À quoi ressemble un code du travail modernisé? Un peu comme l’ancien!

À quoi ressemble un code du travail modernisé? Un peu comme l'ancien!

Par Ivana Saula,
directrice de la recherche, Canada

Alors que les syndicats s’apprêtaient à célébrer la fête du Travail, le gouvernement fédéral a annoncé la mise en œuvre de plusieurs modifications au Code canadien du travail. Le gouvernement fédéral a annoncé aujourd’hui la mise en œuvre de modifications au Code canadien du travail. Au contraire, le gouvernement fédéral libéral a démontré son idéologie en refusant de moderniser véritablement le Code. Malgré les consultations avec les syndicats et en dépit des objections soulevées par plusieurs d’entre eux, les libéraux sont restés sourds aux persuasions d’équité et de justice. Les consultations qui ont duré des mois ne sont que du tape-à-l’œil et qu’une façade, donnant l’impression que les libéraux sont du côté des travailleurs. Malheureusement, c’est une occasion manquée.

Alors, à quoi ressemble un Code « modernisé »?

Tout d’abord, une disposition prévoyant des pauses obligatoires de 30 minutes pour chaque tranche de cinq heures travaillées ne changera rien pour la majorité des salariés. Plusieurs employeurs ont demandé des exemptions et les ont obtenues sans trop d’opposition de la part du gouvernement fédéral, excluant ainsi les travailleurs d’un certain nombre de dispositions. Sans compter que le nouveau système de quarts de travail fractionnés qui a été proposé n’a même pas été abordé. 2. Les quarts de travail fractionnés sont des types d’horaires dans lesquels un quart de travail est divisé en deux ou plusieurs quarts de travail.

Il existe également une exigence imposant des périodes de repos de huit heures entre les quarts de travail prévus à l’horaire. Mais, en raison des exemptions engagées à l’initiative des employeurs, de nombreux travailleurs ne seront pas visés par cette disposition. Cela signifie que dans les industries où les employeurs ont obtenu une exemption, les quarts de travail peuvent être établis à des intervalles de moins de huit heures. Dans la plupart des cas, cela s’avérerait nécessaire lorsqu’il n’y a pas suffisamment de personnel pour pourvoir les quarts de travail et que, plutôt que de doter les postes de manière adéquate, le gouvernement fédéral permet aux employeurs de surmener les salariés. Le Code  « modernisé » supprime un droit fondamental, une norme mondiale, qui est de huit heures de repos. Le mouvement des journées de huit heures par jour est né en 1817 et, en 2019, certains travailleurs canadiens n’y auront toujours pas droit.

Le congé pour obligations familiales s’applique de façon générale, cependant, non sans limitations et charges imposées aux travailleurs. En particulier, les chefs de famille monoparentale, ceux qui s’installent dans de nouvelles villes sans soutien familial et les nouveaux arrivants seront ceux qui supporteront le plus lourd fardeau. Le gouvernement fédéral argue qu’afin de prévenir tout abus de cette disposition, sans fournir de preuves de ces dits abus, les travailleurs seront tenus de prendre d’autres dispositions pour s’acquitter de leurs obligations familiales avant de demander un congé. Qui cela aide-t-il exactement?

Le gouvernement fédéral cause peut être le plus grand tort aux travailleurs qui fuient la violence familiale. On requiert des salariés qui demandent un congé de fournir des documents et le gouvernement fédéral estime que c’est possible sans être intrusif. La violence familiale est par nature à la fois privée et personnelle, et la divulgation d’informations sous une forme documentée révèle invariablement des détails privés sur la vie de quelqu’un.

En fait, les employeurs ont le droit d’obtenir de la documentation pour toute demande de congé, quel qu’en soit le type, ce qui constitue une intrusion injustifiée dans la vie du travailleur.

Si les dispositions ne sont pas suffisamment diluées, ajoutez à la liste la définition large « d’événement imprévisible » qui doit être déterminée par l’employeur. Si les dispositions n’étaient pas suffisamment diluées, ajouter à la liste la définition large du terme « événement imprévisible » de la division 1 de la partie III du code. Le concept n’est pas seulement défini au sens large, il est également laissé à la discrétion de l’employeur de déterminer si un événement est « imprévisible ».Cette détermination laisse une grande marge de manœuvre à ce dernier pour contourner les nouveaux droits proposés dans le cadre de l’initiative de modernisation.

Moderne? Pas vraiment. Une insulte aux travailleurs? Une insulte au mouvement syndical? Absolument. Le temps nous dira si les consultations organisées à la hâte sont suffisantes pour sauver les libéraux aux prochaines élections.

Un adage résume de manière poignante l’initiative de modernisation: « Plus les choses changent, plus elles restent identiques ».